Mouvement "Europe & Laïcité"

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Protéger l'école des lobbys commerciaux

(Voir ci-dessous: modèle de lettre au recteur).

Mars 2000:

La laïcité devrait protéger l'Ecole du commerce et de la publicité.

Aux Etats-Unis, des entreprises équipent en matériel audiovisuel les écoles publiques, à condition qu'elles fassent voir aux enfants 15 minutes de publicité par journée scolaire. Et beaucoup acceptent le marché.

En France, nous n'en sommes pas là, mais nous nous en approchons de manière détournée.

Certains bulletins de syndicats d'enseignants acceptent des publicités d'Eurodisney relatives
à des visites à thème historique, dans le cadre d'excursions scolaires, organisées "clefs en mains" par le parc.

Des "mallettes pédagogiques", pas forcément mal conçues mais polluées de publicité sont offertes aux enseignants.

La laïcité de l'Ecole signifie l'exclusion de la religion, de la politique ainsi que du commerce et de la publicité. Des directives ministérielles le rappellent régulièrement sauf en ce qui concerne la religion, laquelle jouit d'une tolérance encouragée par le laxisme du Conseil d'Etat. (H. Pena-Ruiz montre bien dans son livre "Dieu et Marianne" la partialité du Conseil d'Etat qui sollicite les textes en vue d'autoriser les foulards islamiques dans les écoles.)

En mars 2000, l'association ATTAC (qui milite pour la taxation des transactions financières au service des citoyens) s'était insurgée (par une lettre au ministre Allègre restée sans effet) contre l'organisation par la banque CIC du jeu "masters de l'économie" dans des lycées et collèges.
Il s'agit d'un jeu de simulation de transactions boursières (comme si l'économie se réduisait au boursicottage), avec pour prix un voyage à Wall Street, la Mecque de la Phynance Mondiale.

ATTAC écrit (Lettre électronique no 117 du 10.3.2000):
Nous sommes en présence d'une forme insidieuse de prosélytisme, incompatible avec le principe républicain de laïcité: non pas par les partis, Eglises ou sectes, mais au profit d'un autre dogme, le dogme libéral, celui de la "démocratie actionnariale".

Ça continue de plus belle:


Extrait du bulletin électronique de l'association ATTAC
http://attac.org
(dont le Mouvement Europe et Laïcité s'honore d'être adhérent).

Le jeu-concours "Les Masters de l'économie", proposé sur Internet par
le groupe bancaire CIC en direction des établissements scolaires, est
de retour. Et ce malgré les diverses actions que nous avons menées
contre lui et ses semblables au cours de l'année dernière. Je rappelle
qu'il consiste à faire gérer de manière fictive par des adolescents
un portefeuille de valeurs mobilières de 40 000 euros pour le faire
fructifier le plus possible en un minimum de temps. Des prix sont
attribués aux vainqueurs : voyage à New-York, consoles de jeux
Playstation 2.

Au début de l'été, nous avions obtenu un rendez-vous avec deux
inspecteurs généraux mandatés par Jack Lang, ministre de l'éducation
nationale, au cours duquel nous leur avions demandé de faire cesser
ce jeu immoral au sein de l'école de la République. Nous leur avions
signalé que son caractère publicitaire et commercial était contraire
aux règlements en vigueur dans l'éducation nationale. Leur rapport
devait être remis au ministre. Depuis, nous n'avons eu aucune
nouvelle. Par ailleurs, Jack Lang avait adressé une lettre à Bernard
Cassen, président d'Attac, dans laquelle il écrivait notamment :
" Je crois devoir vous dire, tout d'abord, que j'ai été extrêmement surpris
de l'existence de ce jeu et de son utilisation en classe ".

Et pourtant les inscriptions aux Masters viennent de rouvrir ! Le
challenge " se déroulera du 18 janvier 2001 au 16 mars 2001.

[...]
Nous vous demandons d'adresser une lettre de protestation au recteur
de leur académie, au directeur des services départementaux de
l'éducation nationale à l'Inspection académique, et aux chefs
d'établissement pour leur demander de s'opposer à cette opération de
propagande en l'interdisant dans les établissements scolaires dont ils
ont la charge.

Il conviendra de leur rappeler que :

- le Bulletin officiel de l'éducation nationale du 2 septembre 1999
précise qu' " afin de garantir le respect du principe de neutralité de
l'école, il ne sera pas donné suite aux sollicitations émanant du
secteur privé, dont les visées ont généralement un caractère
publicitaire ou commercial ".

- le ministre de l'éducation Jack Lang, dans sa lettre adressée à
Bernard Cassen président d'Attac, outre les propos cités plus haut,
ajoutait avoir " été encore plus surpris de découvrir l'importance des
actions publicitaires en classe, souvent auprès d'élèves du primaire.
Cet état de fait n'est pas acceptable et découle souvent d'une
mauvaise information des parents et des enseignants sur la
réglementation en vigueur ".

Modèle de lettre:


Prototype de lettre sur "Les Masters de l'Economie" à adapter selon les destinataires.

Monsieur le Ministre,
Monsieur, Madame le Recteur de l'Académie de ......................
Monsieur, Madame le Proviseur du Lycée ....................


Avec le Mouvement Europe et Laïcité dont je suis adhérent, avec l'Association ATTAC et plusieurs autres associations, je proteste contre l'organisation dans le lycée
................... du jeu concours de promotion boursière "Les Masters de l'Economie", et j'en exige, en tant que citoyen(ne) (et parent d'élève), l'annulation immédiate.
Cette protestation est justifiée par mon souci de préserver la laïcité dans les établissements publics d'enseignement, laquelle a pour objet, entre autres, de protéger ces établissements des intrusions religieuses, politiques et publicitaires.

D'autre part je me permets de vous rappeler les termes du BOEN n°30 du 2 septembre 1999 où il est écrit : " de plus en plus de concours et de journées thématiques sont proposés aux élèves et aux enseignants qui représentent, pour les organisateurs, un public ciblé [...] il est nécessaire de recentrer ces concours et journées sur les missions essentielles de l'école.[...] Par ailleurs, afin de garantir le respect du principe de neutralité de l'école et, comme le rappelle la circulaire du 27 avril 1995, il ne sera pas donné suite aux sollicitations émanant du secteur privé, dont les visées ont généralement un caractère publicitaire ou commercial."

Dans une réponse adressée à B. Cassen, président de ATTAC, l'an dernier, Monsieur le Ministre J. Lang s'estimait surpris de l'existence de ce jeu et de son utilisation en classe, ainsi que de l'importance des actions publicitaires dans les écoles.

(Il est de votre devoir, M. ou Mme le Recteur, (M. ou Mme le Proviseur) de faire respecter les dispositions légales et ministérielles sans que les citoyens aient à vous le rappeler.)

Je vous prie d'agréer, M. ......................., l'expression de .........

Copie de cette lettre:
- Journal ...................
- M. Mme le (la) Délégué(e) Départementale de l'Education Nationale,
- M. Mme le (la ) Président(e) de l'Association des Parents d'Elèves ..............................,
- Mouvement Europe et Laïcité: eurolaic@club-internet.fr,
et Association ATTAC (regine@attac.org).

L'affaire "Gilbert Molinier".


Gilbert Molinier, professeur de philosophie au lycée A. Blanqui à Saint-Ouen, a protesté dans son établissement contre l'organisation de ce jeu (sans avis du conseil d'administration) au moyen d'une lettre au proviseur affichée en salle des professeurs.
Le proviseur avait envisagé de l'attaquer en diffamation (car dans sa lettre au proviseur, d'une ironie mordante et parfaitement rédigée, G. Molinier écrit: "Je voudrais savoir si vous-même ou Mme le proviseur-adjoint avez perçu le prix de cette publicité au titre de la taxe d'apprentissage? [...] Peut-être l'avez vous reçu sous forme d'actions boursières offertes par la banque? [Si non, notre lycée] sera-t-il membre bienfaiteur du CIC?"

Une pétition de soutien (ci dessous) a reçu plus de 500 signatures, dont la nôtre, ainsi que celle de nombreuses associations, y compris étrangères, telles Liberté de Conscience (Luxembourg), et ce grâce à notre lettre électronique.

Le proviseur a renoncé à son action en justice. (S'il l'avait maintenue, G. Molinier aurait pu se faire rembourser ses frais de justice par l'administration, ainsi qu'il ressort de la question écrite no 18723 à l'Assemblée Nationale, posée le 7.9.1998).

C'est lui qui attaque son établissement pour non respect de la laïcité.
Nous le soutenons complètement dans ce combat essentiel, et nous souhaitons son plein succès.

A lire:
G. Molinier:
- La gestion des stocks lycéens, idéologies, pratiques scolaires et interdit de penser, L'Harmattan, 1999.

Des extraits de ce livre ont été repris dans son article:
- L'Ecole désinstitutionnalisée, revue L'Aventure Humaine, no 10, 2000, diffusion PUF.

Il y démontre comment l'Ecole remplace la pensée par le bavardage, l'autorité par "l'amour", comment elle vide les disciplines de leurs contenus, se vend aux commerçants avec la complicité des parents d'élèves, et en définitive, fait des élèves les individus dociles dont l'économie dirigée par les banques a besoin.

Pétition de soutien à Gilbert Molinier

Le proviseur et le proviseur-adjoint du lycée Auguste Blanqui de Saint-Ouen ont déposé une
plainte et entamé une action en justice contre Gilbert Molinier, professeur de philosophie dans
le même établissement, auteur d'un ouvrage intitulé "La gestion des stocks lycéens" paru chez L'Harmattan.

Pendant plusieurs semaines, le lycée Auguste Blanqui a participé au jeu-concours des "Masters de l'économie", patronné par une banque privée. Menée dans plusieurs dizaines d'établissements, cette opération tout à fait contraire aux principes fondamentaux de l'école publique a déjà été dénoncée par de nombreuses associations et par des organisations syndicales.

Dans deux lettres adressées à la direction de son établissement, G. Molinier exprime son indignation et demande que soit respecté le principe de laïcité.

De plus, il fait observer que ce " jeu " avait été organisé sans qu'il y ait eu la moindre concertation en conseil d¹administration. Il affirme que cette opération, tout en "assurant ainsi la publicité d'une banque privée, n'a d'autre objectif que de transformer les jeunes dont nous avons en charge l'éducation en clients de ladite banque dans le meilleur des cas et en boursicoteurs de bas étage dans le pire des cas, à savoir des oies à plumer en cas de krach boursier ".

Non content d'avoir écrit cela, que chacun sait, Gilbert Molinier a osé, crime impardonnable, rappeler à son administration une directive ministérielle récente, celle du BO n°30 du 2
septembre 1999 qui écrit : " de plus en plus de concours et de journées thématiques sont proposés aux élèves et aux enseignants qui représentent, pour les organisateurs, un public ciblé [...] Leur superposition finit par brouiller les messages et diluer les contenus. C'est pourquoi il est nécessaire de recentrer ces concours et journées sur les missions essentielles de l'école.[...] Par ailleurs, afin de garantir le respect du principe de neutralité de l'école et, comme le rappelle la circulaire du 27 avril 1995, il ne sera pas donné suite aux sollicitations émanant du secteur privé, dont les visées ont généralement un caractère publicitaire ou commercial."

Ainsi donc, exiger que l'école reste le lieu de l'instruction et ne soit pas transformée en supermarché serait condamnable ?

Ainsi donc, exiger que les cours dans les lycées ne soient pas, comme les émissions de télévision, un moyen de patienter entre deux spots publicitaires serait condamnable ?

Ainsi donc, refuser que l'école enseigne en guise de vertu "l'amour sacré de l'argent" et, en guise de civisme, l'art de s'enrichir vite et sans se fatiguer serait condamnable ?

Non, en réalité, si quelque chose dans cette affaire ressemble à une diffamation, c'est bien plutôt l'accusation portée contre G. Molinier.

Il est ici victime d'une dénonciation calomnieuse et l'école publique elle aussi est diffamée lorsqu'on fait croire aux parents qu'elle pourrait n'être plus le lieu du savoir et devenir une grande surface où des marchands en tout genre viendraient librement vendre leur camelote.

Nous voulons croire que le Ministère de l'Education nationale et le Rectorat interviendront
pour défendre G. Molinier qui n'a fait qu'accomplir ce que lui dictaient sa conscience professionnelle et le devoir moral de tout enseignant.

Nous affirmons notre entière solidarité avec Gilbert Molinier. Si c'est lui qu'on accuse de diffamation, alors nous sommes tous des diffamateurs et, le cas échéant, nous exigerons d'être à ses côtés au banc des inculpés.

Voir le site l'APED:
http://users.skynet.be/aped/

SIGNATURES à: aped@skynet.be

Notes de B. Courcelle :
1) J'ai eu un contact téléphonique avec G. Molinier (vers le 15 mai).
Il a déja reçu 500 signatures dont beaucoup d'universitaires et relativement peu d'enseignants du secondaire. Les syndicats, et même le SNES, le soutiennent.
Les associations de parents d'élèves s'en désintéressent.
Depuis un mois, "l'Humanité" refuse de parler de l'affaire.

2) Soutiens dont j'ai eu connaissance:
Comité Laïcité République,
UFAL, Initiative Républicaine,
Libre Pensée,
Liberté de Conscience
(au Luxembourg).
Voir leurs adresses Internet.

3) Second contact téléphonique le 21 juin:
Le Procureur de la République a jugé irrecevable la plainte en diffamation du proviseur.
G. Molinier a déposé un recours au Tribunal Administratif contre l'organistion de "jeux boursiers", et d'autre part attaque son proviseur.

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