Mouvement "Europe & La?cit?"


  

Etudes et points de vue:
3. La Charte des Langues R?gionales:
Ce que la France accepte et nos critiques
(seconde partie)

       
Mise ? jour: 20 juin 1999

Pour la premi?re partie (ce que la France a sign? et pr?sentation du Conseil de l'Europe).

Du nouveau: Le Conseil Constitutionnel rejette la Charte des Langues r?gionales (le 15.6.1999). La Charte ne sera pas ratifi?e.

Extraits de son communiqu? de presse:

En revanche, sont contraires ? ces normes tant le pr?ambule de la Charte, qui proclame un "droit
imprescriptible" ? pratiquer une langue r?gionale ou minoritaire non seulement dans la "vie priv?e" mais ?galement dans la "vie publique", que certaines dispositions de la partie II,
notamment les dispositions de l'article 7 selon lesquelles :

"En mati?re de langues r?gionales ou minoritaires, dans les territoires dans lesquels ces langues sont pratiqu?es et selon la situation de chaque langue, les Parties fondent leur politique, leur l?gislation et leur pratique sur les objectifs et principes suivants :
...b le respect de l'aire g?ographique de chaque langue r?gionale ou minoritaire, en faisant en sorte que les divisions administratives existant d?j? ou nouvelles ne constituent pas un obstacle ? la promotion de cette langue r?gionale ou minoritaire ;
...d la facilitation et/ou l'encouragement de l'usage oral et ?crit des langues r?gionales ou minoritaires dans la vie publique et dans la vie priv?e...
En d?finissant leur politique ? l??gard des langues r?gionales ou minoritaires, les Parties s?engagent ? prendre en consid?ration les besoins et les voeux exprim?s par les groupes pratiquant ces langues. Elles sont encourag?es ? cr?er, si n?cessaire, des organes charg?s de conseiller les autorit?s sur toutes les questions ayant trait aux langues r?gionales ou minoritaires `".

Ces clauses sont en effet contraires aux principes d?indivisibilit? de la R?publique, d'?galit?
devant la loi et d'unicit? du peuple fran?ais dans la mesure o? elles tendent ? conf?rer des droits
sp?cifiques ? des "groupes" linguistiques ? l'int?rieur des "territoires" dans lesquels ces langues
sont pratiqu?es.

Elles sont ?galement contraires ? l'article 2 de la Constitution dans la mesure o? elles tendent ?
conf?rer le droit d'employer une langue autre que le fran?ais dans la "vie publique", notion dans
laquelle la Charte inclut la justice et les "autorit?s administratives et services publics".

D'autre part, il observe dans les attendus de la d?cision:

Consid?rant qu'en vertu de l'article 2 (? 1) de la Charte, "chaque Partie s'engage ? appliquer les
dispositions de la partie II", comportant le seul article 7, "? l'ensemble des langues r?gionales ou
minoritaires pratiqu?es sur son territoire, qui r?pondent aux d?finitions de l'article 1" ; qu'il
r?sulte de ces termes m?mes que la partie II a une port?e normative propre et qu'elle s'applique
non seulement aux langues qui seront indiqu?es par la France au titre des engagements de la
partie III, mais ? toutes les langues r?gionales ou minoritaires pratiqu?es en France au sens de la
Charte.

Autrement dit, cet article 7 devrait ?tre appliqu? aux 75 langues parl?es sur le territoire fran?ais et non seulement aux 6 ou 7 langues ?voqu?es lors de la signature.
?

Nos commentaires (sur les articles sign?s).

(Ces notes ont ?t? r?dig?es avant que soit publi?e la d?cision du Conseil Constitutionnel)

Les engagements du gouvernement sont pr?sent?s comme la reconnaissance d'un pluri-culturalisme fran?ais qui a ?t? pendant longtemps ignor? par la R?publique. Il s'agirait de redonner la vie aux langues et cultures r?gionales. Malgr? leur apparente innocence ces engagements risquent d'?branler encore un peu plus l'unit? de la R?publique.

De ce point de vue l'article 14 est le plus dangereux: il offre une voie royale ? des revendications autonomistes, comme par exemple au Pays Basque, r?gion linguistique transfrontali?re.

Quelle mise en pratique en sera faite?

Un rapport officiel a identifi? 75 langues parl?es sur le territoire fran?ais (en tenant compte des DOM-TOM). D'autre part les langues r?gionales en France m?tropolitaine ne sont pas parl?es par plus de 5% des personnes des r?gions concern?es (Le Monde, 7.7.1998).
A partir de quel pourcentage de pratique et pour quelles langues sera-t-il justifi? de r?aliser les d?penses (sur fonds publics) pr?vues par les alin?as sign?s de la Charte?

Personne semble-t-il ne remet en cause l'article 2 de la Constitution selon lequel le Fran?ais est la seule langue officielle. Cela implique que le Fran?ais est suppos? connu des citoyens et que c'est la seule langue administrative et l?gale. Il n'y a donc pas lieu de traduire les lois et d?crets, contrairement ? l'article 9. Ces traductions pourraient donner lieu ? interpr?tations divergeantes et donc contestations et alourdissement du travail des tribunaux.

L'enseignement

Les langues r?gionales sont d?ja enseign?es dans les lyc?es. D'autre part, les rapports sur l'enseignement notent que 20% au sortir de l'enseignement primaire ont des difficult?s de lecture et encore plus, d'?criture.

Les signataires s'en prennent aussi ? l'enseignement de l'Histoire, qui devrait laisser de la place ? l'histoire et ? la culture locales (art. 8 al. 1 g). Veut-on cr?er un "nationalisme r?gional" ? l'heure de l'Europe Unie et de la mondialisation? Il est plus urgent de pr?senter les diverses cultures europ?ennes, arabes, orientales. Les gens int?ress?s pourront utiliser leurs loisirs pour ?tudier l'histoire de leurs villages.

Tandis que les valeurs la?ques occupent bien peu de place dans la formation initiale et permanente des enseignants (dans les IUFM), une formation serait am?nag?e afin de pr?parer les enseignants ? l'utilisation des langues r?gionales ? l'?cole!

A l'heure de la mondialisation, il faut promouvoir un enseignement efficace des langues ?trang?res utiles, l'anglais bien s?r, mais aussi les autres. N'est-il pas plus important pour un ?l?ve d'apprendre, le plus t?t possible, l'anglais que le breton, l'espagnol que l'occitan ou le basque, l'allemand que l'alsacien? Sauf ? accepter la mystique en vogue des "racines", la r?ponse va de soi.

M?dias et culture:

L'encouragement ? l'utilisation des langues r?gionales dans les m?dias et les oeuvres culturelles risque de p?naliser l'expression en Fran?ais pour des raisons budg?taires et risque de mettre ? l'?cart des personnels ne connaissant que le Fran?ais.
Ces d?cisions ne vont pas faciliter la diffusion d'?missions scientifiques, techniques et philosophiques ? une ?poque o? le progr?s scientifique est omnipr?sent. Et, donc ? un moment o? les citoyens ont besoin de vulgarisation scientifique pour se positionner sur des probl?mes ?thiques pos?s par les technologies nouvelles, et r?futer les pseudo-sciences et autres discours mystificateurs.

L'interdiction d'interdire:

Il devient interdit de "d?courager l'usage des langues r?gionales ou minoritaires dans le cadre des activit?s ?conomiques ou sociales" (Art. 13 al. 1 d).
Sous couvert de tol?rance, c'est ouvrir la porte ? la propagande r?gionaliste, ? la constitution de clans ? base linguistique. En particulier, dans les services publics, l'emploi des langues r?gionales sera encourag?.

Une intention politique?:

Que les langues r?gionales soient pratiqu?es ne constitue pas en soit une atteinte ? l'unit? de la R?publique mais que les institutions r?publicaines reconnaissent et facilitent l'utilisation de ces langues est d'une toute autre port?e.

Il s'agit en fait d'attribuer des moyens et des privil?ges ? des "comunaut?s" ? base linguistique. C'est totalement contraire ? l'esprit de la Constitution.

De m?me que l'Etat doit ?tre neutre vis ? vis des religions, il n'a pas lieu de reconna?tre de fa?on particuli?re, des bretons, des basques, des corses, des occitans, etc... sinon cela en serait termin? de l'unit? de la R?publique. La R?publique laisserait la place ? une mosa?que de Provinces (comme sous l'ancien r?gime) et ouvrirait la porte ? une balkanisation de l'Ouest de l'Europe.
Il ne peut y avoir de citoyennet? fond?e sur le communautarisme. Elle ne peut s'appuyer, se construire et se d?velopper que sur des valeurs communes ? tous et int?gr?es par tous dans le cadre d'une ?ducation la?que et r?publicaine, et d'institutions la?ques et r?publicaines.

E. Cossevin, B. Courcelle.
(Nous avons utilis? l'article de X. Pasquini: Charlie-Hebdo, 17.5.1999)

Voir nos commentaires sur l'abandon de la Charte. Pour ?crire aux Ministres, Pr?sidents et d?put?(e)s.

Voir aussi l'?tude critique par Ren? Andrau.

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